Un bon exemple de franche camaraderie confraternelle
Quand on est auteur de sous-titres et qu’on en informe le quidam lambda que l’on vient de rencontrer dans un cocktail mondain, il n’est pas rare d’entendre en retour la remarque suivante :
Ah ben y a du boulot, hein. Les sous-titres à la télé/sur les DVD/au cinéma (rayer la mention inutile), ils sont souvent nuls. Y a plein de fautes d’orthographe. Et pi vous traduisez pas tous les mots. D’ailleurs justement, l’autre jour… (Suit une anecdote fort émouvante sur le dernier film qu’a vu le quidam lambda au cinéma, dans lequel il a repéré une erreur de traduction qui n’en est pas une, ou un sous-titre de cinq mots destiné à traduire une longue phrase prononcée à toute allure).
Mais plus le temps passe, plus je m’aperçois que les pires languedeputages sur le boulot des traducteurs audiovisuels n’émanent en fait pas des spectateurs (ces sympathiques profanes), mais plutôt des autres traducteurs.
Et votre blogueuse dévouée ne fait pas exception à la règle, malheureusement. Certes, comme je ne suis qu’amour gloire et beauté, j’envoie de temps en temps un mail enthousiaste aux copines/pains dont j’ai vu le nom à la fin d’un sous-titrage vraiment chouette. Il m’arrive même de pondre une ode vibrante à la gloire du doublage de certains films.
Mais le plus souvent, il faut bien l’avouer, c’est quand même beaucoup plus marrant de chercher la petite bête et de pousser des soupirs d’exaspération en prenant à témoin The Man (qui, en sympathique profane, veut bien être de mon avis, mais ne se sent pas particulièrement concerné par la question). Le tout, bien sûr, en étant persuadée que j’aurais forcément fait mieux si on avait eu le bon sens de me confier cette traduction. Il est d’ailleurs relativement facile de s’en convaincre quand on fait soi-même très peu de sous-titrage de fiction, puisqu’on sait pertinemment qu’on a assez peu de risques de sous-titrer un jour le même film. Comme tu le vois, lecteur atterré de ce blog, ta blogueuse dévouée est non seulement aigrie, prétentieuse et médisante, mais en plus, elle ne se mouille pas (bientôt, un billet sur ma gentillesse naturelle, mon grand cœur et mon audace légendaire).
Bon, mais au-delà de cet aveu, où vais-je, en réalité ? Et à quoi nous mène ce passionnant développement ?
A ceci : pour me remonter le moral – un peu en dents de scie ces temps derniers – j’ai ressorti l’arme fatale : ma pile de DVD de Friends. Jusqu’à présent, je n’avais jamais regardé les sous-titres français (reformatés par SDI pour la sortie DVD) et comme j’ai déjà entendu divers confrères le dire, il est vrai qu’ils laissent une impression un peu mitigée. Mais en même temps, qui suis-je pour critiquer (hein, je vous le demande) ? Les sitcoms sont typiquement des programmes difficiles à sous-titrer : ça jacte sans arrêt, il y a plein de références 100% américaines impossibles à laisser en l’état, les jeux de mots fusent, tous plus débiles et intraduisibles les uns que les autres, et le rythme des dialogues est épuisant. Pas la peine d’être inutilement sévère, donc.
Mais quand même, quand j’ai vu ça, j’ai fait un mini-gloups :
Touche « pause ».
Doute.
Ouverture de mon fidèle Grevisse, jamais bien loin.
Hmm, oui, c’est bien ce que je me disais. Ce qui me permet d’écrire la réponse pas très sympa qui s’était imposée à moi en lisant cette réplique :
Et tes sous-titres, tu les as fait relire ?
Décidément, il est temps que je parte en (vraies) vacances. J’ai trop de venin et d’énergie négative à évacuer.