Les Piles intermédiaires

Le quotidien bordélique d'une traductrice à l'assaut des idées reçues. (Et des portes ouvertes, aussi, parfois.)

Mot du jour (13) et pense-bête perso
Feat. Star Trek, DC Comics et Buffy

(Qu’est-ce qu’il ne faut pas faire pour attirer le chaland, hein.)

Nouveau mot du jour en anglais, croisé dans une traduction :

harbinger

Contexte : des archives radiophoniques à sous-titrer dans un documentaire à l’optimisme déconcertant sur la reconstruction de l’Afghanistan (« The harbingers of the new Afghanistan are roads, clinics, schools, gas pumps, office buildings and police stations literally blanketing the land. »).

Ce n’est pas : eh bien ce n’est pas à proprement parler un mot nouveau pour votre blogueuse dévouée. Mais « harbinger » fait partie de ces termes que je croise de temps en temps et que je suis obligée de chercher dans un dico tout en sachant pertinemment que ce n’est pas la première fois que j’en vérifie le sens (l’autre qui me fait régulièrement le coup, dans cette catégorie, c’est « sartorial« , allez savoir pourquoi – d’ailleurs il m’a fallu 15 minutes pour le retrouver là tout de suite). Une petite vérification dans mes archives m’apprend qu’il figurait en tout cas dans un documentaire sur Jane Fonda que j’ai traduit en 2004 et dans un extrait de pièce de théâtre que j’ai sous-titré en 2007. Tout l’objectif de ce billet est donc de m’éviter une nouvelle recherche la prochaine fois que je le rencontrerai dans un texte. Ne me remercie pas, lecteur qui ne te sens pas concerné de ce blog.

C’est donc :

Selon le Robert & Collins Super Senior (mais qui est Super Senior ?)(et quels sont ses super pouvoirs ?)(autant de questions auxquelles ce dictionnaire ne répond pas, je vous le dis tout de suite) :

Merriam-Webster développe un peu et nous donne quelques précisions étymologiques :

1. archaic : a person sent ahead to provide lodgings
2.
a : one that pioneers in or initiates a major change : precursor
b. : one that presages or foreshadows what is to come

(…)
Examples of HARBINGER
her father’s successful job interview was seen as a harbinger of better times to come

Origin of HARBINGER
Middle English herbergere, from Anglo-French, host, from herberge camp, lodgings, of Germanic origin; akin to Old High German heriberga
First Known Use: 14th century

Le vieux Webster de 1913 donne des explications sur le sens premier du nom :

Wikipedia va dans le même sens :

Bref, tout le monde a l’air à peu près d’accord : un bon vieux mot germano-saxon avec deux sens, le sens actuel étant visiblement dérivé du sens premier, employé à la fois pour désigner un signe avant-coureur ou un présage (quelque chose d’un peu abstrait ou d’inanimé), et une personne qui annonce quelque chose.

Rigolo de regrouper dans une même origine le français « auberge »/ »héberger », l’allemand « Herberge » et ce fameux « harbinger ». Mais on ne va pas s’arrêter là, hein ? Parce que si on a la curiosité de faire quelques recherches complémentaires sur le mot « harbinger », on découvre qu’il est utilisé à tour de bras comme titre et/ou nom propre.

« Harbinger » est ainsi le nom d’un groupe personnages dotés de super-pouvoirs (comme Super Senior, sans doute) dans le comic du même nom publié par Valiant Comics dans les années 90. Mais c’est aussi le nom d’une héroïne qu’on croise chez DC Comics dans les années 80.

Les Harbingers of Skulls sont une lignée qui apparaît semble-t-il dans le jeu de rôle Vampire: The Dark Ages (j’avoue ma totale incompétence en la matière, aussi ne me tape pas dessus si j’écris n’importe quoi, lecteur rôliste de ce blog). Ajoutons qu’il existe un jeu vidéo de 2003 qui porte aussi ce nom (« Harbinger takes place on a massive space ship inhabited by multiple warring races and a band of refugees »). Mais ça ne s’arrête pas là, car dans l’univers du jeu en général, les harbingers divers et variés semblent particulièrement prisés. Voyez plutôt chez Wikipedia :

(Et encore, il en manque !)

(Et tiens, on peut même acheter un vaisseau Harbinger parmi les LEGO Star Wars – oui, moi il n’y a que ça qui m’amuse, chez les Jedi).

Harbinger of Doom est aussi le titre d’une récente série de romans de fantasy signés d’un certain Glenn G. Thater. Et puis Harbinger, lecteur suspendu à ce blog de ce blog, c’est encore tout à la fois le titre d’un roman de la série des Star Trek, celui d’un épisode de Star Trek: Enterprise et celui d’un jeu vidéo Star Trek. Là encore, lecteur indulgent de ce blog, je mouline dans le vide, hein, je ne connais pas du tout l’univers Star Trek, ne me demande donc pas lequel s’inspire duquel ou pas (tu me suis ?). En revanche, si tu as des infos à ce sujet, n’hésite pas à les partager en commentaire pour combler cette regrettable lacune personnelle.

Pour compléter, signalons qu’on trouve aussi de très sympathiques Harbingers of Death chez Buffy.

Existent aussi en figurines. Bon goût assuré. Très rassurants sur une table de chevet.

Au total, donc, tout plein de références dans ce qu’on a coutume de désigner par le vocable fort désobligeant de « sous-culture » (ce qui a toujours le don de m’énerver). Surprenant, non ? Est-ce à cause de la sonorité du mot ? Est-ce parce que c’est aussi le nom d’un relief lunaire (Montes Harbinger), ce qui lui donne une connotation mystérieuse (et spatiale, accessoirement) ? Ou est-ce le côté prophétique du terme et son association naturelle avec des mots comme « of doom »/ »of death », qui lui assurent un petit air apocalyptique ? Ou encore cette étymologie étrangère, que l’on pressent peut-être, et qui lui confère une sonorité exotique et inhabituelle ? Ou tout simplement, comme l’exprime cet internaute synthétique adepte des deux points de suspension sur un forum consacré à Battlestar Galactica au cours d’une discussion absolument fascinante sur les pseudos des différents participants…

Si on y ajoute (liste non exhaustive) une revue publiée par un collectif anarchiste, une publication religieuse du 19e siècle, une maison d’édition, quelques entreprises, un cheval de course et un navire québécois construit au 18e siècle, on voit en tout cas que ce mot inspire.

Sans oublier The Harbinger of Light, revue australienne funky consacrée au spiritualisme.

La précision inutile de Tatie Les Piles :

Il y a même une planche d’un Harbinger de Valiant dans laquelle on croise un fan… de Star Trek. Na d’abord.

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